Les origines du Carnaval d’Evolène

Aussi loin que les plus anciens du village s’en souviennent, le carnaval d’Evolène a toujours existé entre le  6 janvier, soir de l’Epiphanie et le Mardi gras. Aucune trace écrite ne permet de définir avec certitude l’origine de cette tradition. Cependant, certains historiens ayant étudié d’autres carnavals de montagne ont imaginé que ces coutumes remontent à la préhistoire, époque de laquelle datent les premiers masques.

Les peuplades celtes qui vivaient en Valais lors de l’âge de bronze pratiquaient déjà, durant tout l’hiver, de nombreux rituels masqués destinés à faire fuir les mauvais esprits afin de protéger leurs villages des avalanches et permettre au printemps d’arriver. C’est certainement de cette époque que remonte l’origine des peluches et des empaillés du Carnaval d’Evolène.
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Durant l’Antiquité, le Valais faisait partie de l’Empire romain et en adopta les coutumes. Les Bacchanales, Lupercales, Saturnales étaient des fêtes romaines qui se rattachaient aux traditions religieuses de la plus haute Antiquité. Elles célébraient le commencement de l’an nouveau et le réveil de la nature. Or, avant toute nouvelle création, le monde doit retourner au chaos primordial pour se ressourcer. C’est pourquoi, durant cette période, l’ordre de la société était totalement chamboulé. Les esclaves devenaient les maîtres, les maîtres prenaient la place des esclaves en les servant à table par exemple, les hommes se déguisaient en femmes, les enfants en adultes… Sous le couvert du masque, devenait permis ce qui était habituellement interdit. On se moquait des autorités, des anciens, on les caricaturait, on tournait leurs habitudes et leurs décisions en dérision…
La tradition des Maries, bien que plus tardive, s’inspire beaucoup du carnaval de cette époque.
 
Dès le 3ème siècle après J-C, le christianisme s’installa peu à peu dans notre région. Les religieux souhaitèrent tout d’abord éliminer les fêtes païennes des habitudes des gens mais la tâche se révéla impossible. Petit à petit, ces fêtes ont donc été intégrées au calendrier chrétien entre la période de Noël et celle de Pâques. L’église a aussi cherché à leur donner une légère connotation chrétienne. Par exemple, dans de nombreux endroits, des représentations maléfiques étaient livrées aux flammes pour symboliser la fin de l’hiver. On a alors lié cette tradition au fait de livrer tous les péchés au feu purificateur afin d’être prêt à entrer dans le carême. C’est le cas de la Poutratze* à Evolène.
Le terme « carnaval » lui-même vient du christianisme : il provient du mot latin « carnelevare », composé de « carne » (viande) et de « levare » (laisser, lever), ce qui signifie s’abstenir de viande, manière courante de pratiquer le carême à l’époque.
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Dans de nombreux coins de l’Europe, le temps du Carnaval est d’une grande richesse folklorique. A cette occasion, les traditions les plus anciennes et les plus étranges réapparaissent. © Gilbert Vogt L'enquête photographique en Valais (1990), essayage d'un masque par un jeune garçon.Ces fêtes, issues des rites païens, se sont perpétuées à travers le Moyen-Age et la Renaissance, jusqu’à nos jours en ne cessant de s’adapter et d’évoluer selon le mode de vie des gens qui les ont pratiquées.
Générations après générations, les Evolènards se transmettent leur passion. Ce sont les jeunes qui, entre 10 et 30 ans, font véritablement vivre la tradition. Ils continuent à l’adapter selon leurs envies et selon les contraintes du monde qui les entourent. A Evolène, le carnaval est ancré dans l’histoire du lieu et dans la vie des habitants.

A Evolène, on peut donc imaginer que le carnaval actuel comporte des restes de rites celtes, s’inspire du côté festif des fêtes romaines et conserve toutes les adaptations apportées par le christianisme.

 

Photo 1 : ©bequilles.ch
 Photo 2 : ©Gilbert Vogt  L’enquête photographique en Valais (1990)